SF et singeries

Attention : Spoilers de niveau 5/5 !

L’article ci-dessous contient des spoilers : divulgation de l’ensemble des aspects majeurs de l’œuvre, y compris ses conclusions et épilogues, ses coups de théâtres décisifs, et/ou des aspects complémentaires ou extérieurs à l’œuvre.

Article importé

L’article ci-dessous provient d’un ancien blog (qui lui-même contenait des articles très variés, ne portant généralement pas sur la BD). Lors de sa présente republication, il a été légèrement modifié. Mais en plus d’être plus ou moins daté, son formalisme ne suit donc pas la ligne éditoriale actuelle du blog que vous êtes en train de visiter.

Un petit avis sur cette trilogie en BD. Récit de science fiction aux dessins ultra-réalistes, mon avis est mitigé, en particulier en ce qui concerne l’histoire de fond de cette série.

Synopsis

Tome 1

Point du tout de rapport avec la célèbre planète simiesque ici. Il s’agit d’une BD, dont le troisième et dernier tome est sorti il y a peu, et que j’ai acheté en même temps que le dernier Thorgal. Mais j’ai attendu d’avoir un peu de temps afin de me relire l’intégralité des deux premiers albums avant de découvrir l’ultime tome.

Avant d’aller plus loin, résumé :

2035. La cinquième flotte du pacifique revient de mission en Indonésie et croise non loin du canal de mozambique, lorsque son amiral reçoit un message surprenant de la maison blanche. Il a pour mission de récupérer un objet inconnu qui est en train de traverser l’atmosphère et qui va vraisemblablement s’abîmer dans l’océan. Arrivé au point de chute, l’objet est récupéré et semble être une capsule spatiale telle qu’on les concevait au milieu du XXeme siècle. Celle-ci se révèle habitée par deux hommes. Devant l’incohérence de la situation, l’armée américaine fait appel à Hélène, astronaute de la NASA, qui aurait dû être le premier humain à fouler la planète Mars avant que sa mission ne soit annulée. En effet, aussi aberrant que cela puisse paraître, les deux hommes récupérés dans la capsule semblent être… Neil Armstrong et Buzz Aldrin !

Cette série se nomme donc « Le Complexe du Chimpanzé » et comprend les 3 tomes suivant :

  • 1. Paradoxe
  • 2. Les fils d’Ares
  • 3. Civilisations

Ces trois tomes sont sorti sur une durée de deux ans et demi, ce qui est une cadence nettement plus rapide que la plupart des séries de BD.

Un triptyque étrange

J’avais découvert un extrait du premier tome (je ne sais plus où), et je n’avais pas pu résister à lire et acheter la suite. Le premier tome est vraiment très bien fait. Il faut savoir que le résumé ci-dessus n’est que le pitch et ne correspond qu’au 10 ou 15 premières pages du tome 1. Après quoi, Hélène se retrouve embarquée dans une enquête spatiale qui va la mener sur le Lune, puis en direction de Mars à la fin du premier tome.

Tome 2

Lorsque j’ai découvert la sortie du second tome, je l’ai lu illico dans le rayon du Virgin, avant de l’acheter. Cela dit, sur le coup, j’avais trouvé l’orientation de l’histoire plus qu’obscure ! Des Russes menés par Youri Gagarine (himself) seraient allés sur Mars dans les années 70 sans que personne ne le sache ?! Ils y seraient toujours mais n’auraient l’impression d’y être que depuis 10 ans ?? Pourquoi pas, mais l’explication à intérêt d’être béton. Pourtant, à ce niveau pas grand chose… A cela s’ajoutaient 2 ou 3 réflexion plus ou moins métaphysiques qui ne m’ont pas aidé à éclaircir cette histoire. Cela dit, j’ai mis c’est étrangeté sur le compte des conditions dans lesquelles j’avais lu ce deuxième tome, et sur le fait qu’en tant que tome 2 d’une trilogie, il lui manque forcément le début et la fin…

Arrive alors le tome 3… On avait laissé Hélène à la fin du tome 2 dans sa navette, en congélation, de retour de Mars, mais ne parvenant plus à retrouver la Terre. On la retrouve maintenant dans sa même navette, 70 ans plus tard (!). La navette est arrimée à un énorme vaisseau qui, après être apparu comme un engin extra-terrestre, semble finalement être un appareil construit par des humains évolués (!!), sans doute plusieurs siècle après son départ de la Terre. Comble de l’ironie : après avoir voyagé 70 ans en ligne droite dans l’espace, elle se retrouve en orbite de Mars (!!!). Et en bouquet final, après avoir effectué de nouveau le retour vers la Terre, Hélène se retrouve une 20aine d’années après son départ (!!!!). Vous ne comprennez rien ? Moi non plus ! Quid de Armstrong ou des Russes sur Mars ? Mais plus aucune allusion ma bonne dame !

Sans queue ni tête

Car effectivement, ce tome 3 (tout comme le tome 2, en fait, après relecture), n’a ni queue ni tête ! Mais quand je dis ça, c’est qu’il n’y a vraiment aucun sens ! Les personnages (Hélène en particulier) voyagent dans l’espace et dans le temps sans aucune logique, ni la moindre explication. Les évènements surviennent sans cohérence : retour de Armstrong et Aldrin, rencontre de Gagarine, disparition de la Terre, vaisseau humain du futur, aller/retours dans le temps… Ca arrive comme sur une tapis roulant, et on passe au suivant, sans aucun lien.

A se mettre sous la dent, on n’a qu’un vague fil rouge donné par Gagarine au milieu du tome 2, mais aucunement développé par la suite : le principe d’incertitude d’Heisenberg. Celui-ci stipule que pour des particules élémentaires, il n’y a pas de certitude de présence, mais simplement des probabilités de présence. L’idée de cette série serait donc que ce même principe s’applique à l’échelle macroscopique sur tout ce qui est envoyé dans l’espace !! L’idée, en soi, n’est pas mauvaise. Mais comme dit plus haut, ce n’est absolument pas développé plus que ça ! Il faut donc se contenter de ça pour expliquer la présence de Armstrong simultanément lors de son retour en 1969 et lors de son apparition en 2035, ainsi que la présence de son cadavre sur la lune ! Idem, Gagarine est simultanément dans son glacier martien mais aussi en décomposition dans un coin de la base Russe. Du grand n’importe quoi, je vous dis !

Mais attendez, ne partez pas ! Ce n’est pas fini !

Tome 3

Car en plus d’un grand globi-boulga au niveau du scénario général, on a des incohérences énormes sur des tas de points ! Comment les Russes ont-il fait pour développer un programme martien en pleines seventies ? Comment un amiral de la marine peut-il se retrouver à participer à une mission spatiale du jour au lendemain ? Comment Gagarine a-t-il pu survivre 10 (sinon 60) ans dans un glacier, simplement en se nourrissant, mais sans quitter sa combinaison spatiale ? Comment Hélène parvient-elle à utiliser la technologie d’un vaisseau humain qui aurait près de 1000 ans d’avance sur elle ? …

Franchement ridicule !!!

Concernant les personnages, c’est loin d’être extraordinaire, là aussi ! Le personnage principal manque singulièrement de charisme. Les membres de son équipage ne sont pas assez developpés pour qu’on puisse les apprécier (à l’exception d’Aleska, peut-être). Son superieur (Robby) disparaît entre le tome 2 et le tome 3. Quant à la fille d’Hélène… Ah ! La fille d’Hélène ! On a vaguement l’impression que le scénariste aurait voulu que le lecteur se mette à sa place et éprouve sa souffrance de voir sa mère la négliger… Mais tout ce qu’il obtient, c’est un personnage creux, mou, geignant, et sans le moindre intérêt. Le seul sentiment qui m’a traversé, c’est l’envie de lui mettre une baffe !

Venons-en aux dessins. Pour ma part, je suis très bon public concernant les graphismes. Si une histoire me plait, je me satisferai globalement de n’importe quel type de dessin. Si l’histoire me plait moins, en revanche, je vais essayer de me rabattre sur le graphisme (qui permet parfois de sauver un album). Ici, donc, compte tenu de l’estime que j’ai envers cette succession d’évènements (que je ne pourrais résolument pas appeler « scénario »), je me suis instinctivement tourné vers les graphismes. Le dessinateur a un genre… on va dire… particulier ! Ultraréaliste, il est parfois à la limite de la photo. Si ça passe très bien pour tout ce qui est machinerie, ça donne un résultat très étrange pour les personnages. J’ai parfois réellement eu l’impression de photos collées sur un dessin, au point de regarder l’illustration à quelques centimètre. Je ne vous le cache pas, en général, c’est moche ! En plus de ça, ce style « photographique » rend les scènes complètement statiques, et donc irréelles, ce qui tranche encore plus avec le style de dessin hyper-réaliste !

Une planche (pas si moche !)

Il est vrai que l’ambiance globale fait un peu penser à la très bonne série de BD « Universal War One ». Mais ce « Complexe du Chimpanzé » ne lui arrive pas à l’ongle du petit orteil !

Après navigation sur internet, la plupart des lecteurs partagent mon avis. Mais quelques-uns soutiennent quand même la grande qualité de la série, usant d’arguments metaphysiques ! Il est vrai que l’existence d’une explication plus ou moins philosophique à ce récit m’avait traversé l’esprit, mais après réflexion, je ne la voit pas ! D’ailleurs, ceux qui attestent d’une telle explication à cette série ne développent jamais plus loin. La seule réplique pseudo-philosophico-poético-scientifique à laquelle on pourrait penser est cette phrase de Gagarine dans le tome 2 : « Avec notre apparition, l’Univers s’est doté d’une conscience de lui-même« . Oui. Et…? Cette phrase tombe comme un cheveux sur la soupe, et ne veux strictement rien dire (tout comme l’ensemble de cette série, de tout façon).

Mais, et ce fameux « complexe » alors ? C’est quoi ? Ah ah ah ! Bonne question ! Il est seulement évoqué dans le premier tome et réfère à la panique notée sur des chimpanzé lorsque la NASA a fait des expériences sur eux pour le vol dans l’espace. Il s’explique par le fait que le singe à conscience qu’il se passe quelque chose, mais qu’il est aussi conscient qu’il n’est pas assez intelligent pour le comprendre. D’où ce complexe. Mais quel rapport avec l’histoire alors ? Là aussi, bonne question ! Peut-être le fait que Hélène ne comprend pas ce qui lui arrive… Pour ma part, j’ai une autre théorie : c’est sans doute une allusion au fait que le lecteur, une fois le tome 3 terminé, n’a effectivement pas compris ce qui lui est arrivé !

Je vais arrêter le massacre là. Mais tout ça pour dire qu’on est plus au temps de la SF de papy, où il suffisait d’une soucoupe ou d’un mutant pour faire un super récit de science-fiction !

Trois tomes, deux ans et demi d’attente, un dessin laid, des incohérences à la pelle, un scénario inexistant, 35€ le tout, chez moi ça a un nom : une arnaque !

4 commentaires sur “SF et singeries”

  1. Tu a etè très clair, Ekho. Message reçu, si je tombe par hasard sur un "Complexe du scimpanzè" au supermarchè (non pas que j’ai quelques chances, ici), je ne vais pas l’acheter.

    Et pourtant, je trouve qu’il y a un truc sympa dans la sèrie "Le Complexe du Chimpanzé": le titre de la trilogie…

  2. M’ouais. Mais bon, quand tu sais que ça n’a pas grand chose à voir (idem pour le titre de chaque album d’ailleurs)…

    Vraiment, à éviter. ^_^

  3. J’ai dû en lire un tome ou deux de ce truc. Je ne me souviens que de la fugue de la fille d’Hélène, d’une serre sur Mars, de Gagarine qui raconte un truc censé faire très mystérieux dans un glacier sur Mars, et du fait qu’à la fin Hélène est dans un vaisseau qu’ils ne peuvent plus contrôler et qu’ils se congèlent dedans à la fin en attendant. Voilà, c’est tout.

    Ça m’avait paru plutôt bizarre et menaçant de partir en sucette/brioche/cacahouète/nouille (il y a beaucoup de variante de cette expression…). D’après ton article, c’est effectivement le cas.

    En résumé, c’est pas le cadeau à offrir à Noël, c’est bien ça ? 😉

  4. D’après tes brefs, il s’agit effectivement de cette… chose !

    Et comme tu le supposais, ça part effectivement en trombone (cette expression n’existe pas, mais ça sonne bien je trouve).

    A éviter pour Noel, donc. ^_^

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