Kevin a trouvé refuge chez une riche ancienne cliente. Il tente de retrouver la trace de Mélinda… Et ignore que celle-ci semble avoir perdu la raison et est internée sous surveillance dans un établissement psychiatrique, à la merci de Crombie et Rowney.
Pendant ce temps, l’agent Davis, mystérieuse “ombre” dans une organisation tout aussi énigmatique, est chargée d’enquêter sur le meurtre de Grovesnor, un milliardaire sulfureux… Et bientôt, l’existence de créatures manipulatrices, agissant en secret, semble refaire surface au fil de son enquête.

Ce deuxième tome du Chant des Stryges embraye sur un rythme plus soutenu, tout en restant au croisement du thriller d’espionnage et du fantastique paranoïaque. Corbeyran densifie son intrigue en y mêlant des corporations occultes associées à des intérêts géopolitiques qui brouillent encore plus les enjeux, mais dans le bon sens du terme. Le scénario gagne en ampleur, mais parfois au prix d’une certaine opacité : les liens entre Kevin et l’agent Davis paraissent trop forts et trop rapides, pour être crédibles à ce stade de second tome.
Le récit privilégie l’action : fuites, infiltrations, chasse à l’homme s’enchaînent dans une atmosphère haletante. Les dialogues, bien calibrés, servent une tension constante. Même les scènes plus calmes — typiquement en présence de Josh, toujours figure de l’achétype du mentor — livrent d’importantes révélations, sans doute de manière un peu trop didactiques.

Graphiquement, Guérineau reste fidèle au premier tome, avec des compositions efficaces et fonctionnelles. Le charadesign reste solide, même si le personnage de Winnie, légèrement sursexualisé, rompt avec la gravité du reste. À l’inverse, la chute de Mélinda dans la folie constitue l’une des réussites visuelles les plus marquantes de l’album, capturant toute la dimension tragique du récit.
Notons une jolie allusion au film Pulp Fiction, qui a largement inspiré deux des hommes de mains s’attaquant à Kevin, dont les traits reprennent ceux de Samuel L. Jackson et John Travolta.
Plus dense, plus inquiétant, Pièges poursuit l’introduction de la série vers le grand récit de conspiration surnaturelle qui fera sa réputation. Un album d’introduction mais aussi de confirmation : celle d’un duo d’auteurs qui maîtrise déjà l’art de la tension.
